L’obligation d’information des professionnels et établissements de santé en matière de cicatrices postopératoires

L’obligation d’information des professionnels et établissements de santé en matière de cicatrices postopératoires
Publié le 16/04/18

Une femme, prise de douleurs mictionnelles dans la matinée du 8 juin 2009, puis de douleurs épigastriques dans la soirée, a été orientée par un Service de médecine d’urgence vers le Service des Urgences du Centre Hospitalier Universitaire du KREMLIN-BICETRE, établissement relevant de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, où elle a été admise pour une suspicion de pyélonéphrite et a subi plusieurs examens.

Le chirurgien viscéral a alors décidé de pratiquer une laparotomie exploratrice.

Cette intervention chirurgicale a été à l’origine d’une cicatrice indolore de 18 centimètres de longueur.

Par jugement en date du 15 mai 2015, le Tribunal Administratif de MELUN a considéré que l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris avait manqué à son obligation d’information qu’elle tient de l’article L.1111-2 du Code de la Santé Publique et l’a condamnée à verser à la patiente une somme de 3.700 euros en réparation de ses préjudices.

Par arrêt en date du 29 juillet 2016, la Cour Administrative d’Appel de PARIS a annulé le jugement rendu en première instance et rejeté les demandes indemnitaires de la patiente.

Cette dernière s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’État.

Or, par arrêt en date du 8 février 2018 (Conseil d’État, 5ème Chambre, 8 février 2018, N°404190), le Conseil d’État a annulé l’arrêt rendu par la Cour Administrative d’Appel de PARIS au visa de l’article L.1111-2 du Code de la Santé Publique.

L’article précité (issu de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé) consacre, au profit des malades, un droit à l’information.

Ce droit doit permettre aux patients de consentir, de façon éclairée, aux actes médicaux qui les concernent et susceptibles de porter atteinte à leur intégrité physique.

A contrario, les professionnels de santé sont tenus à une obligation d’information envers leurs patients.

Comme le rappelle l’article L.1111-2 du Code de la Santé Publique, cette information porte :

« sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ».

Il peut donc aussi bien s’agir des risques de décès ou d’invalidité, que des risques fréquents ou graves.

Par ailleurs, un risque exceptionnel ne dispense pas un médecin d’informer son patient.

En pratique, seuls l’urgence, l’impossibilité et le refus du patient d’être informé permettent aux professionnels de s’exonérer de leur obligation d’information.

Dans son arrêt en date du 8 février 2018 (Conseil d’État, 5ème Chambre, 8 février 2018, N°404190), le Conseil d’État vient préciser que cette obligation d’information, à la charge des professionnels et établissements de santé, s’applique également en matière de cicatrices postopératoires.

En effet, le Conseil d’Etat rappelle que la patiente :

« a conservé de la laparotomie qu’elle a subis une cicatrice de 18 centimètres en travers de l’abdomen, particulièrement apparente ; qu’en jugeant que les médecins n’avaient pas à l’informer que l’intervention aurait une telle conséquence, au motif qu’elle ne pouvait être regardée comme un risque de l’acte pratiqué au sens des dispositions de l’article L.1111-2 du code de la santé publique, alors que ces dispositions exigent également que le patient soit informé des conséquences de cet acte, la cour a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit par suite être annulé en tant qu’il statue sur la réparation des conséquences d’un manquement de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris à son obligation d’information ». 

Par conséquent, la patiente n’ayant pas été informée sur le fait qu’elle resterait atteinte d’une cicatrice à la suite de son intervention chirurgicale, l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris a commis un manquement à son devoir d’information engageant sa responsabilité et ouvrant droit à indemnisation pour la victime.

Le devoir d’information qui pèse sur les professionnels et établissements de santé est donc général et englobe donc toutes les conséquences, même non médicales, d’une intervention chirurgicale ou d’un acte médical. Tribunal de Grande Instance de PARIS, sauf en ce qu’elle a accepté de majorer certaines indemnités allouées au profit de la victime. 

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