Critère d’anormalité rempli en cas de survenance prématurée des troubles auxquels était exposé le patient en l’absence d’opération

Publié le 22/08/22

Un homme, qui présentait une claudication intermittente due à une courte occlusion de l’artère fémorale superficielle droite, a subi, le 20 juin 2012, une chirurgie carotidienne sous anesthésie loco-régionale, réalisée par une chirurgien libérale.

A la suite de l’intervention, le patient est demeuré hémiplégique après la survenue, au cours de l’opération, d’une crise convulsive généralisée.

Il est finalement décédé le 7 novembre 2016.

Son épouse et ses enfants ont alors assigné en responsabilité et indemnisation le chirurgien, son assureur, ainsi que l’Office Nationale d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (l’ONIAM) et ce, aux cotés des tiers payeurs. 

Par arrêt en date du 22 octobre 2020, la Cour d’appel de PARIS a débouté les ayants droits de leurs demandes.

Pour mettre hors de cause l’ONIAM, la Cour d’appel de PARIS a en effet considéré que le critère d’anormalité n’était pas rempli.

Les ayants droits se sont alors pourvus en cassation à l’encontre de cette décision.

Aux termes de leur pourvoi, ils rappellent que la condition d’anormalité du dommage doit être regardée comme remplie lorsque l’acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l’absence de traitement.

Ils ajoutent que sont anormaux les troubles, entraînés par un acte médical, survenus chez un patient de manière prématurée, alors même que l’intéressé aurait été exposé à long terme à des troubles identiques par l’évolution prévisible de sa pathologie. 

Or, par arrêt en date du 6 avril 2022 (Cour de cassation, Civile 1ère, 6 avril 2022, Pourvoi n°21-12825), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par les ayants droits et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’appel de PARIS.

Comme le rappelle la Cour de cassation au visa de l’article L.1142-1 II du Code de la Santé Publique, la condition d’anormalité du dommage doit être regardée comme remplie lorsque l’acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie de manière suffisamment probable en l’absence de traitement et que, dans le cas contraire, les conséquences de l’acte médical ne peuvent être considérées comme anormales sauf si, dans les conditions où l’acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. 

La Cour de cassation ajoute que les conséquences de l’acte médical peuvent être notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie de manière suffisamment probable en l’absence de traitement si les troubles présentés, bien qu’identiques à ceux auxquels il était exposé par l’évolution prévisible de sa pathologie, sont survenus prématurément. Dans ce cas, une indemnisation ne peut être due que jusqu’à la date à laquelle les troubles seraient apparus en l’absence de survenance de l’accident médical.

Or, en l’espèce, la Cour d’appel de PARIS n’avait pas pris en compte le fait que l’intervention avait entraîné de manière prématurée la survenue des troubles auxquels le patient était exposé.

Par conséquent, le critère d’anormalité était rempli en l’espèce et l’ONIAM devait être condamné à indemniser les ayants droits du patient. 

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