Agression d’un salarié d’un établissement de santé par un patient et faute inexcusable de l’employeur

Agression d’un salarié d’un établissement de santé par un patient et faute inexcusable de l’employeur
Publié le 8/04/24

Dans la nuit du 8 au 9 janvier 2017, la salariée d’un établissement de santé a été agressée par une patiente, au sein du services des urgences. 

Cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie des HAUTS-DE-SEINE.

Par ailleurs, la victime a saisi la juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

Par arrêt en date du 16 juin 2022, la Cour d’Appel de VERSAILLES a fait droit à l’argumentation de la salariée victime.

Son employeur s’est lors pourvu en cassation.

Aux termes de son pourvoi, il conteste toute faute inexcusable dès lors que : 

  • Le fait que les accès aux Urgences aient été ouverts 24 heures sur 24 était indifférent dans la mesure où un patient, une fois pris en charge, pouvait être l’auteur d’une agression ; 
  • La mise en place d’agents de sécurité dédiés à la protection et de portes fermant la zone de soins n’aurait pas été en mesure d’empêcher l’accident ;   
  • Il avait mis en place, avant l’accident, des mesures de nature à prévenir le risque d’agression en recrutant notamment un maître-chien et en ayant fait appel à une prestation de sécurité de niveau 2, de 20 h à 07h00 ; 
  • L’hôpital a organisé régulièrement des formations sur la gestion de la violence et les situations traumatisantes ; 
  • Aucun dispositif supplémentaire n’aurait pu empêcher l’accident, dû au comportement imprévisible de la patiente ; 
  • Il serait excessif de placer, au sein de l’hôpital, des agents de sécurité armés, des portes blindées ou un filtrage systématique comme le soutenait la victime, tandis que la multiplication des dispositifs de sécurité ne pourrait, en aucun cas, garantir un risque zéro quant à la survenance d’un incident.

Par arrêt en date du 29 février 2024 (Cour de cassation, Civile 2ème, 29 février 2024, Pourvoi n°22-18868), la Cour de cassation a rejeté l’argumentation développée par l’employeur et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de VERSAILLES.

Comme le rappelle la Cour de cassation, il résulte des articles L.452-1 du Code de la Sécurité Sociale et L.4121-1 et L.4121-2 du Code du Travail que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

En l’espèce, la victime a subi une agression physique par une patiente rentrée dans l’espace ambulatoire alors que le médecin ne prêtait pas attention à elle et que seule l’équipe de soins est intervenue pour les séparer.

La recrudescence d’actes violents au sein du service des urgences de l’hôpital avait été évoquée dès 2015, en raison, notamment, de l’engorgement des services générant l’insatisfaction des usagers, l’altération des conditions de travail et la dégradation de la qualité des soins. 

Dès lors, l’employeur ne pouvait ignorer le risque d’agression accru, encouru par le personnel soignant, médecin compris.

Par ailleurs, le recrutement d’un agent de sécurité et la fermeture de la zone de soins par des portes coulissantes, qui lui avaient été demandés par certains salariés pour sécuriser les locaux, sont postérieurs à l’accident du travail.

En outre, le contrat de sécurité cynophile était manifestement insuffisant à prévenir les risques d’agression au sein même de l’hôpital.

De plus, l’organisation de formations sur la gestion de la violence constituait une réponse sous-dimensionnée par rapport à la réalité et la gravité du risque encouru.

Par conséquent, les mesures de protection mises en œuvre par l’employeur étaient insuffisantes ou inefficaces à prévenir le risque d’agression auquel était soumis son personnel.

Dès lors, la Cour de cassation confirme la faute inexcusable commise par l’employeur. 

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