Obligation du médecin prescripteur gynécologue de s’assurer des résultats de l’examen médical demandé trisomie 21

Publié le 11/07/18

Une gynécologue, chargée de suivre la grossesse d’une patiente, a, le 11 décembre 1999, lors de la visite du troisième mois, prescrit à cette dernière un test sanguin, destiné notamment à déceler un éventuel risque de trisomie 21, examen à effectuer entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 2000.

Le 6 janvier 2000, la patiente a fait réaliser ce prélèvement au sein d’un premier laboratoire d’analyses qui l’a transmis à un second laboratoire ; ce second laboratoire, n’étant pas équipé du logiciel permettant d’analyser les prélèvements effectués au-delà de la dix-huitième semaine, les a adressés à un troisième laboratoire, situé à PARIS.

Les résultats du test ont alors mis en évidence un risque accru de donner naissance à un enfant atteint de trisomie 21 mais n’ont été transmis, ni au médecin du second laboratoire, ni à la gynécologue, ni à la patiente.

A compter de sa trente-troisième semaine de grossesse, la patiente a été suivie par un second gynécologue-obstétricien, en vue de son accouchement.

Le 27 mai 2000, la patiente a donné naissance à une enfant atteinte de trisomie 21.

Le 24 juin 2003, agissant tant en leur nom personnel qu’en qualité de représentants légaux de leur fille mineure, la patiente et son conjoint ont agi en responsabilité et indemnisation à l’encontre des deux médecins gynécologues, soutenant que l’absence de diagnostic de la trisomie 21 les avait privés de la possibilité de demander une interruption médicale de grossesse.

L’enfant étant née avant l’entrée en vigueur de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002, l’application de l’article L.114-5 du Code de l’Action Sociale et des Familles a été écartée.

Par arrêt en date du 7 juillet 2006, rendu sur renvoi après Cassation (Cour de cassation, Civile 1ère, 31 octobre 2012, Pourvoi n°11-22756), la Cour d’Appel de PAPEETE a condamné in solidum les deux médecins gynécologues à indemniser les préjudices subis par la patiente et son conjoint, résultant du handicap de leur fille.

Les deux praticiens se sont alors pourvus en cassation.

S’agissant du second gynécologue, ayant pris en charge la patiente à compter de sa trente-troisième semaine de grossesse, il rappelle à l’appui de son pourvoi que les médecins ne sont tenus que d’une simple obligation de moyen envers leurs patients. Or, il existait un usage entre le praticien ayant prescrit le test sanguin et le laboratoire chargé de son analyse ; seuls les tests démontrant l’existence d’une trisomie 21 étaient alors retransmis au médecin prescripteur. En l’absence de transmission des résultats par le laboratoire, le second gynécologue, intervenu en fin de grossesse et succédant à sa consœur, allègue qu’il n’avait pas de raison de suspecter une trisomie 21 ni de vérifier auprès du laboratoire le résultat de l’examen prescrit par un autre praticien.

S’agissant du premier gynécologue ayant prescrit le test sanguin, elle rappelle que l’obligation d’information loyale, claire et appropriée du médecin cesse en cas d’impossibilité de le faire. Cette impossibilité serait caractérisée lorsque le médecin ne dispose pas, sans faute de sa part, de cette information. Le laboratoire d’analyse médicale n’informant le médecin prescripteur qu’en cas de risque avéré de trisomie 21, ce dernier pouvait légitimement penser qu’il n’existait aucun risque puisqu’aucun résultat ne lui a été retourné.

Néanmoins, dans son arrêt en date du 3 mai 2018 (Cour de cassation, Civile 1ère, 3 mai 2018, Pourvoi n°16-27506), la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation n’a pas accueilli cette argumentation et a confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de PAPEETE.

Comme le rappelle la Cour de cassation, la gynécologue « ayant prescrit l’examen, devait être en mesure d’informer elle-même sa patiente quant à son résultat, sans dépendre des aléas d’une communication par les laboratoires, que l’intervention des médecins biologistes des laboratoires chargés du test ne pouvait la dispenser d’en demander le résultat et qu’elle n’était pas fondée à opposer à [la patiente] l’absence de toute réponse des laboratoires relatives à l’examen ordonné ni à se prévaloir de leur erreur ou de leur négligence ».

Selon la Cour de cassation, la gynécologue ayant prescrit le test sanguin a donc commis une faute en ne sollicitant pas le résultat de l’examen demandé.

Quant au second gynécologue obstétricien, il a également commis une faute en ne s’assurant pas du résultat de ce test dès lors que le dossier médical de la patiente faisait apparaître l’existence d’une demande d’examen sanguin mais ne contenait aucune réponse au test demandé.

Ainsi, selon la Cour de cassation, les obligations de soins et d’information du médecin imposent à ce dernier de s’assurer des résultats des examens médicaux qu’il a prescrits et qui ne lui ont pas été transmis. Le médecin ne saurait se contenter d’une absence de réponse. En ne sollicitant pas les résultats, il commet une faute engageant sa responsabilité médicale et ouvrant droit à indemnisation au profit de la victime.

En l’espèce, il est très probable que les médecins décident de se retourner, dans un second temps, à l’encontre du ou des laboratoires d’analyses médicales qui ne leur ont pas retransmis les résultats du test sanguin alors que celui-ci faisait apparaître l’existence d’un risque de trisomie 21 et ce, afin d’obtenir un partage de responsabilité.

Il appartiendra alors à la juridiction saisie d’apprécier la gravité des fautes respectives commises par les médecins gynécologues et les laboratoires d’analyses médicales pour répartir la dette d’indemnisation entre eux.

Force est donc de constater que la Cour de cassation opère un contrôle strict de ce poste de préjudice afin de garantir la réparation intégrale des préjudices subis par la victime.

Une gynécologue, chargée de suivre la grossesse d’une patiente, a, le 11 décembre 1999, lors de la visite du troisième mois, prescrit à cette dernière un test sanguin, destiné notamment à déceler un éventuel risque de trisomie 21, examen à effectuer entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 2000.

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