L’état antérieur asymptomatique de la victime ne saurait réduire ou exclure son droit à indemnisation, notamment en cas d’abcès anal

L’état antérieur asymptomatique de la victime ne saurait réduire ou exclure son droit à indemnisation, notamment en cas d’abcès anal
Publié le 24/11/25

Le 7 septembre 2012, au cours d’une opération d’un abcès anal, une patiente a subi une lésion sphinctérienne et conservé une incontinence anale.

Elle a alors saisi la Commission de Conciliation et d’Indemnisation des Accidents Médicaux qui a ordonné une mesure d’expertise médicale.

A la suite du dépôt du rapport d’expertise, la Commission de Conciliation et d’Indemnisation des Accidents Médicaux a estimé que la patiente avait été victime d’un accident médical non fautif indemnisable au titre de la solidarité nationale.

L’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (l’ONIAM) a toutefois refusé de formuler une offre d’indemnisation au bénéfice de la victime.

Après avoir obtenu une expertise judiciaire en référé, la victime a assigné l’ONIAM en indemnisation de ses préjudices.

L’existence d’un accident médical indemnisable au titre de la solidarité nationale sur le fondement de l’article L.1142-1, II, du Code de la Santé a été admise.

Toutefois, par arrêt en date du 14 décembre 2023, la Cour d’Appel de PARIS a limité l’indemnisation à la charge de la l’ONIAM à hauteur de 75%.

En effet, selon la Cour d’Appel de PARIS, la lésion sphinctérienne à l’origine de l’incontinence anale a été occasionnée, d’une part par l’abcès dont souffrait la patiente qui avait déjà provoqué des lésions des fibres sphinctériennes sans incontinence et, d’autre part par le geste chirurgical comportant un risque de 1% de présenter un tel trouble.

Si l’abcès ne pouvait, à lui-seul, avoir causé l’incontinence, il était la cause de celle-ci dans une proportion de 25%.

Si l’intéressée ne présentait aucune incontinence avant l’intervention, son abcès, en l’absence d’opération, aurait aggravé sa situation et, lésant le sphincter, aurait été à l’origine d’une incontinence.

La victime s’est pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.

Aux termes de son pourvoi, elle rappelle que : 

  • Son incontinence anale était inexistante avant l’intervention chirurgicale ; 
  • Cette incontinence était, au plus, virtuelle avant l’opération, en dépit de l’abcès ; 
  • L’opération avait pour objet, en particulier, de la rendre impossible en supprimant sa cause ; 
  • Seule l’intervention chirurgicale, en réalisant le risque thérapeutique, a provoqué une incontinence qui n’existait pas antérieurement et qui n’aurait pas dû exister postérieurement.

Par ailleurs, elle ajoute que le droit de la victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable.

Par arrêt en date du 24 septembre 2025 (Cour de cassation, Civile 1ère, 24 septembre 2025, Pourvoi n°24-13707), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de PARIS et ce notamment au visa du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

Comme le rappelle la Cour de cassation, en application de l’article L.1142-1, II, du Code de la Santé Publique, l’indemnisation au titre de la solidarité nationale due à la victime d’un accident médicale est intégrale.

Par ailleurs, cette indemnisation ne saurait être réduite en raison des prédispositions pathologiques lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée que par l’accident médical survenu.

En l’espèce, la Cour de cassation souligne qu’il résulte des constatations de la Cour d’Appel de PARIS que la patiente ne présentait pas d’incontinence anale avant son opération.

De plus, l’apparition de celle-ci résulte de la survenue de l’accident médical lors de l’intervention.

Par conséquent, il ne saurait être retenu une quelconque réduction du droit à indemnisation de la victime ; l’ONIAM sera tenu de réparer l’intégralité des préjudices subis par la victime.

Pin It on Pinterest