Attaque de requin lors d’une sortie en mer et condamnation pénale de la guide de plongée

Une jeune femme a été attaquée par un requin alors qu’elle participait à une sortie en mer, organisée par une guide de plongée.
Publié le 19/05/25

Une jeune femme a été attaquée par un requin alors qu’elle participait à une sortie en mer, organisée par une guide de plongée.

Cette dernière a été poursuivie pour blessures involontaires et pour deux infractions au Code de l’Environnement de la Polynésie Française.

Le Tribunal Correctionnel l’a déclarée coupable de chasse audiovisuelle de mammifère marin non autorisée mais l’a relaxée du surplus de la prévention. Par ailleurs, l’assureur responsabilité civile de la guide de plongée a été mis hors de cause.

Le Ministère Public et l’ensemble des parties ont interjeté appel.

Par arrêt en date du 17 août 2023, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de PAPEETE a déclaré la guide de plongée : 

  • Coupable d’avoir exercé une activité d’approche et d’observation des mammifères marins de catégorie A et B, espèces protégées reconnues vulnérables ou en danger par le Code de l’Environnement de la Polynésie Française, en exerçant à titre lucratif une activité d’observation des baleines sans avoir obtenu l’autorisation requise pour le navire utilisé ; 
  • Coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois sur la victime ; 

Par ailleurs, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de PAPEETE a rejeté la demande de mise hors de cause de l’assureur responsabilité civile de la guide de plongée.

Ces derniers se sont alors pourvus en cassation à l’encontre de l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de PAPEETE.

Or, par arrêt en date du 1er avril 2025 (Cour de cassation, Chambre criminelle, 1er avril 2025, Pourvoi n°23-85211), la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la guide de plongée et son assureur et confirmé la décision attaquée.

Pour condamner la prévenue, l’arrêt attaqué énonce que l’arrêté du Ministre de la Culture et de l’Environnement du 27 juin 2019, autorisant l’employeur de la guide de plongé à exercer cette activité d’approche des baleines et autres mammifères marins, liait expressément cette autorisation à la validité du permis de navigation du navire utilisé pour ladite activité.

Ce permis, valide jusqu’au 23 août 2019, n’a été prorogé qu’à compter du 22 octobre 2019.

Or, l’attaque de requin est survenue, le 21 octobre 2019, soit la veille.

Les juges du fond en déduisent donc que l’autorisation d’observation et d’approche des mammifères marins délivrée à la guide de plongée n’était pas en vigueur le jour des faits.

Par ailleurs, s’agissant de l’infraction de blessures involontaires, il ressort des éléments du dossier que tous les participants à la sortie en mer ont remarqué, dès après la première mise à l’eau, la présence à proximité d’un requin.

L’un d’eux, inquiet, a interpellé la guide, qui lui a répondu que ce requin ne mordait pas.

Aucune consigne supplémentaire n’a été donnée avant la troisième mise à l’eau, au cours de laquelle la victime a été attaquée par le requin.

Or, la guide de plongée, du fait de son expérience, savait que cette espèce de requin était capable d’attaques imprévisibles.

Les juges du fond en concluent qu’en décidant sans précautions particulières, en présence d’un requin à proximité, d’une troisième mise à l’eau, la guide de plongée a exposé la victime à un risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer.

Selon la Cour de cassation, ces motifs établissent l’existence d’une faute caractérisée par la laquelle la guide de plongée a créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage subi par la victime.

Enfin, la Cour de cassation refuse de faire droit à la demande de mise hors de cause de l’assureur de la guide de plongée.

En effet, les juges du fond ont relevé que le contrat d’assurance souscrit couvre notamment les dommages survenus à l’occasion de l’organisation ou de l’accompagnement d’activités par des moniteurs ou guides de plongée, à condition que l’assuré respecte les licences commerciales, permis d’exploitation et permis de travail délivrés, pour l’activité de plongée professionnelle, dans son pays de résidence.

Or, la guide de plongé disposait des diplômes et autorisations nécessaires pour encadrer l’activité réalisée le jour des faits.

L’absence de permis de navigation du navire est sans lien avec le dommage et sans incidence sur la garantie de l’assureur.

La clause générale d’exclusion de garantie ne peut pas plus trouver application, la négligence grave de l’assurée correspondant à une infraction intentionnelle non retenue en l’espèce.

Les juges du fond en concluent que l’activité exercée entre dans le champ d’application du contrat et qu’aucun motif d’exclusion de garantie n’est démontré par l’assureur.

Selon la Cour de cassation, en statuant ainsi, la Cour d’Appel de PAPEETE a motivé sa décision.

En effet, la négligence grave de l’assurée, qui suppose un acte délibéré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables, ne se confond pas avec la faute caractérisée, qui suppose la simple conscience du risque d’occasionner un dommage, retenue à l’encontre de la prévenue dans le cadre de la prévention de blessures involontaires.

L’assureur de la guide de plongée sera donc tenu d’indemniser l’intégralité des préjudices subis par la victime de l’attaque de requin.      

Pin It on Pinterest