Accident médical non fautif indemnisable par l’ONIAM : rappel du caractère alternatif des deux critères d’anormalité

Accident médical non fautif indemnisable par l’ONIAM : rappel du caractère alternatif des deux critères d’anormalité
Publié le 8/12/25

Le 26 septembre 2012, une patiente présentant un méga-œsophage idiopathique a subi une ablation de ce dernier et son remplacement par l’estomac.

A la suite de l’intervention chirurgicale, elle a présenté une lésion de la trachée ayant nécessité la réalisation d’une thoracotomie.

La patiente a néanmoins conservé des troubles digestifs et respiratoires.

Le 30 juin 2017, après avoir sollicité l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire en référé, elle a assigné en indemnisation l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (l’ONIAM) au titre d’un accident médical non fautif. 

Toutefois, par arrêt en date du 16 novembre 2023, la Cour d’Appel de PARIS a rejeté les demandes indemnitaires de la patiente, estimant que le critère d’anormalité n’était pas rempli en l’espèce. 

En effet, s’agissant des troubles digestifs, la Cour d’Appel de PARIS a considéré que la paralysie récurentielle gauche et la hernie diaphragmatique subies par l’intéressée caractérisent des conséquences plus graves que celles dont elle aurait souffert en l’absence d’intervention mais que leur probabilité n’est pas suffisamment faible pour justifier une prise en charge par la solidarité nationale.

Par ailleurs, s’agissant des troubles respiratoires, la Cour d’Appel de PARIS a estimé que la plaie trachéale présentée par la patiente constitue une complication redoutée, survenant dans 1 à 2% des cas, mais que cette plaie ne saurait être prise en compte que pour une part très minoritaire dans la dégradation de la fonction respiratoire.

La patiente s’est donc pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.

Or, par arrêt en date du 15 octobre 2025 (Cour de cassation, Civile 1ère, 15 octobre 2025, Pourvoi n°24-14186), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de PARIS et ce, au visa de l’article L.1142-1, II, du Code de la Santé Publique.

Il résulte de ce texte que, lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I, ou celle d’un producteur de produits n’est pas engagée, l’ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition notamment qu’ils présentent un caractère d’anormalité au regard de l’état de santé du patient comme de l’évolution prévisible de cet état.

Comme le rappelle la Cour de cassation, le critère d’anormalité est rempli : 

  • Soit, lorsque l’acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l’absence de traitement ; 
  • Soit, dans le cas contraire, si, dans les conditions où l’acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.    

Ces deux critères sont alternatifs et non cumulatifs.

Or, comme le précise la Cour de cassation : 

  • S’agissant des troubles digestifs, « la Cour d’Appel, qui, en appliquant le premier critère, a pris en compte la probabilité de survenue du dommage se rapportant second » ; 
  • S’agissant des troubles respiratoires, « la Cour d’Appel, qui, en appliquant le second critère, a pris en compte la gravité des conséquences auxquelles était exposée [la patiente] se rapportant au premier » ; 

En exigeant le cumul des deux critères pour caractériser l’anormalité, la Cour d’Appel de PARIS a violé l’article L.1142-1, II, du Code de la Santé Publique. 

Par cette décision, la Cour de cassation rappelle donc que les deux critères d’anormalité sont alternatifs et non cumulatifs. 

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