La réouverture d’un dossier en aggravation ne suppose pas la production de la décision indemnitaire initiale

Le 22 mai 1987, alors âgé de deux ans, un enfant a été victime d’un accident de la circulation impliquant un véhicule automobile assuré par la société UAP, aux droits de laquelle se trouve la société AXA France IARD.
En 2016, la victime, faisant valoir que cet accident lui avait causé des blessures initiales plus importantes que celles décrites par un rapport d’expertise médicale amiable réalisé en 1992 et invoquant une aggravation de son état de santé survenue en 2015, a obtenu la réalisation d’une mesure d’expertise médicale judiciaire.
Le 10 avril 2017, à la suite du dépôt du rapport, la victime a assigné l’assureur en indemnisation de ses préjudices initiaux et aggravés, en présence des tiers payeurs.
Toutefois, par arrêt en date du 31 janvier 2023, la Cour d’Appel de GRENOBLE l’a débouté de son action fondée sur une aggravation de son dommage.
Selon la Cour d’Appel de GRENOBLE, une demande en réparation de l’aggravation d’un préjudice ne peut être accueillie que si la responsabilité de l’auteur prétendu du dommage et le préjudice initialement indemnisé ont pu être déterminés.
Toujours selon elle, il appartient donc à la victime de rapporter la preuve de l’indemnisation de son état initial, que ce soit une indemnisation transactionnelle ou judiciaire.
Or, la victime n’était pas en mesure, en l’espèce, de produire le procès-verbal de transaction régularisé à l’époque de l’accident et ce, compte tenu du long délai écoulé depuis lors.
La Cour d’Appel de GRENOBLE en déduit donc que la victime ne prouvait pas qu’il y avait eu détermination initiale des préjudices et une indemnisation initiale de ceux-ci, raison pour laquelle elle a rejeté sa demande.
La victime s’est alors pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.
Par arrêt en date du 3 avril 2025 (Cour de cassation, Civile 2ème, 3 avril 2025, Pourvoi n°23-18568), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de GRENOBLE et ce, au visa du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.
Comme le rappelle la Cour de cassation, il résulte de ce principe qu’une demande en réparation de l’aggravation d’un préjudice ne peut être accueillie que si la responsabilité de l’auteur prétendu du dommage a été reconnue et le préjudice initial déterminé.
En l’espèce, l’implication du véhicule assuré n’était pas discutée.
Par ailleurs, les préjudices initiaux subis pas la victime avaient fait l’objet d’une expertise médicale amiable réalisée en 1992, puis d’une expertise médicale judiciaire en 2017, ce dont il résultait que le préjudice initial était déterminé, peu important qu’il ait ou non été indemnisé.
Par conséquent, dès lors que le préjudice initial était déterminé, rien ne s’opposait à une réouverture de son dossier en aggravation par la victime.