Infection nosocomiale contractée en Nouvelle Calédonie et régime juridique applicable

Inaptitude au poste de travail antérieur et pertes de gains professionnels futurs
Publié le 28/04/25

Le 6 janvier 2017, un rhumatologue libéral a pratiqué une injection intra-articulaire d’acide hyaluronique dans le genou gauche d’un patient, destinée à améliorer l’état ostéo-articulaire de celui-ci qui avait fait l’objet d’une double méniscectomie, le 16 mai 2013

Le 11 janvier 2017, alors que le patient se trouvait en Nouvelle-Zélande, une arthrite septique à staphylocoque lui a été diagnostiquée et un lavage articulaire a été pratiqué au SOUTHLAND HOSPITAL.

Le 24 janvier 2017, le patient a subi un lavage arthroscopique du genou gauche au sein du Centre Hospitalier Territorial GASTON BOURRET de Nouvelle-Calédonie.

Le 19 mai 2017, il a été procédé à une arthrolyse arthroscopique de ce même genou. 

Par ordonnance en date du 7 février 2018, le Juge des Référés du Tribunal de Première Instance de NOUMEA a ordonné une mesure d’expertise médicale.

Le 12 mai 2018, l’Expert Judiciaire a déposé son rapport définitif.

Sur la base des conclusions de ce rapport, le patient a alors saisi le Tribunal de Première Instance de NOUMEA afin de solliciter la condamnation du médecin à l’indemniser de ses différents préjudices.

Toutefois, par jugement en date du 20 février 2023, le patient a été débouté de l’intégralité de ses demandes, la juridiction estimant qu’aucune faute n’avait été commise par le professionnel de santé libéral.

Par déclaration en date du 31 mars 2023, le patient a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt en date du 10 février 2025 (Cour d’Appel de NOUMEA, Chambre Civile, 10 février 2025, RG n°23/00106), la Cour d’Appel de NOUMEA a fait droit à l’argumentation développée par le patient et infirmé le jugement rendu en première instance.

Comme le précise la Cour d’Appel de NOUMEA, il résulte des conclusions de l’Expert Judiciaire que si le rhumatologue libéral n’a commis aucun manquement aux règles de l’art en réalisant la viscosupplémentation du 6 janvier 2017, l’infection diagnostiquée le 11 janvier 2017 a été contractée lors de cette intervention.

Au demeurant, le médecin et son assureur ne contestent pas le lien entre le geste médical et l’arthrite septique. 

Par ailleurs, la Cour d’Appel de NOUMEA rappelle que le régime de responsabilité, institué par l’article L.1142-1 du Code de la Santé Publique, introduit par la loi n°2002-303 du 4 mars 2022, n’est pas applicable en Nouvelle-Calédonie.

En l’absence de toute disposition légale spécifique, susceptible d’être mise en œuvre, il doit être fait application des principes dégagés avant l’entrée en vigueur de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002.

Or, selon la jurisprudence de la Cour de cassation applicable avant l’entrée en vigueur de la Loi KOUCHNER, le médecin était tenu, à l’égard de son patient, d’une obligation de sécurité de résultat en matière d’infection nosocomiale, dont il ne pouvait se libérer qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère (Cour de cassation, Civile 1ère, 29 juin 1999, Pourvoi n°97-21903 ; Cour de cassation, Civile 1ère, 18 octobre 2005, Pourvoi n°04-14268). 

En l’espèce, l’arthrite septique, dont a souffert le patient, est une infection nosocomiale puisqu’elle est survenue au cours ou au décours de sa prise en charge et qu’elle n’était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci.

Il en résulte que le rhumatologue libéral ne peut échapper à sa responsabilité qu’en rapportant la preuve de la cause étrangère à l’origine du dommage. 

A cet égard, il importe peu que le médecin libéral ait pratiqué l’acte litigieux dans son cabinet personnel et non dans une structure collective, publique ou privée.

De plus, la circonstance qu’aucune faute ne puisse être imputée au rhumatologue ne lui permet pas d’échapper à la responsabilité de plein droit qui pèse sur lui.

La preuve d’une cause étrangère n’étant pas rapportée, le médecin et son assureur se bornant à se retrancher derrière l’absence de faute du praticien, la responsabilité de ce dernier est bien engagée.

Le rhumatologue libéral et son assureur responsabilité civile professionnelle seront donc tenus d’indemniser intégralement les préjudices subis par la victime, en lien avec l’infection nosocomiale qu’elle a contractée. 

Pin It on Pinterest